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Comment apprendre à déléguer ?

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La santé physique et mentale des chefs d’entreprises et des managers n’est pas une chose à prendre à la légère. En 2020, les dirigeants travaillent en moyenne 50,5 heures par semaine, soit plus de 15 heures de travail supplémentaires par rapport aux salariés (Olivier Torres, Observatoire Amarok). Sans compter sur le contexte économique qui les met sous pression, tout comme leur rôle de tampon entre les objectifs des investisseurs (ou des supérieurs hiérarchiques) et les requêtes de leur équipe. Selon cette étude, il y a près d’un dirigeant sur 5 (17,5 %) qui sont au bord du « burn-out » (= crise psychologique et sociale, liée au surmenage). Il est donc grand temps de donner les clés et les méthodes pour apprendre à déléguer aux chefs d’équipes, aux managers, aux responsables RH et aux entrepreneurs individuels qui externalisent. Apprendre à déléguer, efficacement et avec méthode, est la compétence primaire indispensable, enseignée dans le « business coaching » (= accompagnement d’entrepreneurs) et le « time management » (= gestion du temps). Apprendre à bien déléguer prends du temps, demande de la pratique (un coach ou une formation peut faire gagner des années d’expérience) et de bien connaitre ses équipes. Déléguer, c’est à la fois demander de l’aide à ses collaborateurs pour faire une tâche, plutôt que de la faire soi-même, et, en même temps, transiter sa responsabilité de bien exécuter la tâche. C’est pourquoi, confier ses tâches du jour au lendemain sans précautions et sans travail préliminaire est risqué et contre-productif pour la santé de l’entreprise et de ses membres.

Comment être prêt à déléguer quand on est chef d’entreprise ou responsable d’une équipe ?

Définir vos motivations à déléguer dans votre entreprise

Les dirigeants ne doivent pas attendre l’urgence, comme une crise professionnelle, personnelle (ou les 2) ou une charge de travail accablante pour prendre conscience de l’importance de déléguer. D’autres mauvaises raisons de s’y mettre peuvent être l’ennui et la perte de motivation des managers comme de leurs équipes.

Mais dans l’idéal, il est préférable de se former en amont et de définir les bonnes raisons pour lesquelles déléguer est indispensable et très efficace pour améliorer le fonctionnement d’une entreprise. On peut citer :

  • Réduire la charge mentale et le stress des chefs d’équipes pour améliorer leur bien-être et leur santé psychique.
  • Diminuer la charge de travail et se libérer du temps pour faire ce qu’on fait le mieux ou ce pour quoi on a été embauché.
  • Atteindre plus vite un meilleur résultat grâce à l’intelligence collective.
  • Laisser de la place et faire confiance à son équipe et être soi-même dans son rôle pour que tout le monde s’investisse à 100 %.
  • Pouvoir s’absenter et prendre des congés sans être sans cesse dérangé pour des questions.
  • Permettre la transmission du savoir afin de pouvoir, un jour, revendre ou franchiser son business.

Démarche d’acceptation psychologique du processus de délégation

Entre l’intention de déléguer et son application, il y’a une marche, difficile à franchir pour certains. Il faut d’abord que le chef d’équipe ou l’entrepreneur fasse un profond travail sur lui-même et sur sa capacité à déléguer. Il doit apprendre à faire confiance aux autres et arrêter de tout faire tout seul ou de vouloir microcontrôler toutes les actions de ses subordonnés. Pour y arriver, il faut arriver à déprogrammer ses croyances limitantes (en répétant des affirmations positives par exemple) :

Se questionner sur sa vision du leadership (= autorité) pour ne pas croire que pouvoir rime avec tout prendre en charge.

Travailler sur son égo, car, non, ce n’est pas lui qui produira le meilleur travail pour toutes les tâches.

Tordre le cou au perfectionnisme pour accepter les petites imperfections et les méthodes différentes.

Exercer sa confiance et sa capacité à donner ET à recevoir de l’aide des autres.

Quand on est jeune chef d’entreprise ou manager, tout comme les chefs de famille, on a tendance instinctivement à se plier en quatre pour accomplir notre mission et satisfaire le groupe dont on a la responsabilité. Apprendre à déléguer, sans culpabiliser, sans perdre son rôle central ni l’estime des membres du groupe et trouver son équilibre personnel et professionnel est déjà un grand pas vers une réussite durable.

Comment préparer et mettre en place la délégation des tâches ?

Analyser votre entreprise comme un système qui doit produire un résultat fiable

Un système (= process) est une démarche ou un processus (fait par un humain ou une machine) qui produit un résultat de manière fiable et régulière. On fournit au système des données de départ et il réalise le travail long et pénible tout seul. Une entreprise est un système, composé de sous-systèmes (chaque service par exemple), eux même encore divisés en équipes de travail. Chaque rouage doit donc fonctionner au mieux pour ne pas enrayer la machine et bloquer le système.

Il faut donc définir chaque mission, ou tâche que l’on réalise et détailler au mieux le système, afin de l’analyser. En listant toutes les tâches, on peut décider pour améliorer son système-entreprise soit de les standardiser, soit de les déléguer (aux employés de la société) ou de les externaliser (sous-traiter à des freelances ou des partenaires).

Confier les bonnes tâches aux bons collaborateurs

À partir de là, il suffit de distribuer les tâches en les confiant aux personnes les plus compétentes pour les faire. Un dirigeant ou un manager à tout intérêt à déléguer les tâches suivantes :

  • celles qui peuvent être accomplies par quelqu’un d’autre dans une limite de temps définie,
  • celles qui sont répétitives et faciles,
  • celles qui l’éloignent de son projet, ses compétences, de la valeur ajoutée pour laquelle il a été embauché,
  • celles qu’il reporte sans cesse, plutôt que de procrastiner, si quelqu’un est capable de les faire.

Définir et documenter les procédures et les cas résolus

Pour chaque tâche, décrire précisément et clairement comment elle doit être réalisée. Telle une recette de cuisine, la procédure, ainsi écrite noir sur blanc, pour accomplir la tâche permet qu’elle soit reproduite par n’importe quel collaborateur ou prestataire avec les compétences minimums requises pour le poste. Rédiger toutes les procédures est long et fastidieux, mais cela vaut le coup de prendre le temps nécessaire. Pour chaque tâche, la procédure doit définir le cadre de la mission, les objectifs, le temps imparti, le degré d’autonomie, les outils et les moyens mis à disposition, les évolutions possibles de la mission.

Une entreprise doit documenter ses procédures pour accomplir les tâches, plus ou moins récurrentes, mais aussi celles pour résoudre les problèmes les plus courants. Dès que quelqu’un résout un problème, il doit documenter comment il a résolu le souci. Les employés et partenaires doivent avoir à disposition, sur un drive ou un réseau privé, une boîte à outils avec les scripts de délégation, les procédures, les cas résolus, les documents types… Et au fur et à mesure, il suffit ensuite de les mettre à jour et de les améliorer petit à petit.

Comment bien superviser les équipes et améliorer ensemble le système-entreprise

Former et contrôler les chargés de mission

Le rôle du manager ou du responsable n’est pas seulement de distribuer la charge de travail et de mandater les bonnes personnes sur chaque mission. Sa place est aussi celle du superviseur, mais pas tel un « petit chef » qui contrôle tout et tout le temps. Au contraire, il effectue le suivi en contrôlant de moins en moins les tâches au fur et à mesure que l’employé gagne en expérience et en autonomie.

Avoir confiance, ne veut pas dire transiter ses responsabilités à un débutant (ou un nouveau) dans l’équipe sans le former. La formation continue des collaborateurs, et pas seulement des employés, est aussi très importante. Au début, quelqu’un réalise la mission avec la personne en formation, puis on le laisse travailler seul avec l’aide des procédures et outils, en demandant un feedback régulier. Ces bilans constructifs peuvent être organisés en présentiel ou à distance et de manière hebdomadaire, puis mensuelle. Quand l’exécutant devient totalement autonome, on contrôle le résultat de ses missions, de temps en temps et au hasard. Pour finir, on vérifie uniquement les tâches qui n’ont pas été remplies, et on n’oublie pas de le féliciter pour le reste !

Faire le bilan et choisir les axes d’améliorations

Pour finir, le responsable doit laisser la possibilité aux plus expérimentés de ne pas suivre la procédure (du moment que le résultat est là !). Difficile quand on a passé autant de temps à les écrire, de se remettre à nouveau en question. C’est pourtant comme cela que les procédures s’améliorent, en comparant les deux procédures pour la même mission. La synthèse et l’évolution des procédures sont bénéfiques pour le business (plus d’efficacité), comme pour l’humain (plus de reconnaissance et d’accomplissement). Suite aux bilans hebdomadaires ou mensuels, vous écoutez les propositions d’améliorations de la personne qui a réalisé la tâche, mais c’est bien vous qui décidez de la meilleure solution pour améliorer tout le système.

Le secret d’un bon management réside dans la communication, empathique et bienveillante, et dans la transparence sur les objectifs et les méthodes. S’il ne doit pas être joint au moindre problème en dehors du travail, le chef d’entreprise ou d’équipe doit répondre dans un temps raisonnable aux mails et aux questions. Un super manager est attentif et à l’écoute de ses troupes. Avant de constater impuissant le résultat décevant d’une mission, il doit se préoccuper en amont des difficultés rencontrées par ses employés et trouver des solutions pour les aider à terminer la tâche. Les employés ne doivent pas avoir peur d’être jugés ou être gênés de parler ouvertement de leurs problèmes. S’ils se sentent critiqués ou pas à la hauteur, ils ne se confieront plus. Le pire cauchemar d’un manager, c’est de ne pas voir la catastrophe arriver, car son salarié fait l’autruche jusqu’au dernier moment, jusqu’à foncer droit dans le mur.

Pour faire simple, pour avoir des employés et partenaires qui se donnent à 100 %, le chef doit leur faire confiance et les laisser prendre des initiatives. L’importance pour l’entreprise, c’est que le travail soit réalisé, bien et de façon uniforme et régulière. C’est aussi que la transmission des savoirs se fasse et que l’entreprise fonctionne de mieux en mieux, même en votre absence ! Et c’est là que la formation des dirigeants d’entreprise et des chefs d’équipe est nécessaire : pour anticiper et préparer la passation, plutôt que déléguer forcé et contraint ! Tout le monde dans l’entreprise doit être responsabilisé, encouragé à s’exprimer et à participer au processus d’amélioration des procédures et du système. Les troupes ont besoin d’être guidées, et qu’on les aide à monter en compétence (dont l’autonomie), tout comme les responsables d’entreprise qui peuvent apprendre à déléguer !